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Pierre Henri Deballon : « Paris&Co est très proche d’une startup, ambitieuse mais avec une croissance saine, rentable et maîtrisée »

Pierre-Henri Deballon coche toutes les cases de l’entrepreneur à succès : à la tête d’une startup, Weezevent, qui connaît une croissance continue, une victoire aux Grands Prix de l’Innovation, une incubation remarquée chez Paris&Co, dont il est désormais Président du Conseil d’Administration. Avec un regard bienveillant mais réaliste sur les défis qui attendent l’agence, il retrace le parcours de son entreprise, finalement assez similaire à celui de Paris&Co. Interview sans tabou.
D’où viens-tu et qu’est-ce qui t’a mené à l’entrepreneuriat ?
Mon père est entrepreneur et ce caractère m’a véritablement été transmis. C’est peut-être aussi du mimétisme, de faire le choix de la liberté : liberté d’entreprendre, de choisir son projet, d’être son propre patron, même si cette liberté implique beaucoup de contraintes, car au-delà de la vie quotidienne, votre projet vous habite. Le déclic est venu de l’un de mes premiers postes, dans lequel je conseillais des entrepreneurs. Mon supérieur hiérarchique m’avait dit : « on ne peut faire une belle trajectoire professionnelle que là où ses qualités s’expriment le mieux ». Je l’avais pris comme un conseil, mais c’était plutôt un message subliminal !
C’est à ce moment là qu’est née l’idée de Weezevent ?
J’avais monté un premier projet étudiant avec Sébastien, mon associé de toujours : Le Vélotour, qui permet de découvrir une ville de façon insolite à vélo. Aujourd’hui, c’est une entreprise qui rayonne dans 10 villes françaises. Nous avions très tôt fait le constat qu’il nous manquait un système de billetterie adapté à nos besoins. C’est là qu’est née l’envie de créer une société qui allait répondre aux besoins des organisateurs en cassant toutes les barrières que nous avions rencontrées. Nous voulions que la billetterie devienne un outil de meilleure connaissance du public des événements et plus un casse-tête pour les organisateurs. Nous avons créé Weezevent en 2008 et avons commencé à travailler dans un appartement à Paris, puis nous avons été hébergés à Noisy-le-Sec, avant d’être incubés à Nord Express. Nous sommes à Saint-Denis depuis que Vente Privée est entré au capital de Weezevent en 2015.
« Nous avons créé Weezevent en 2008 et avons commencé à travailler dans un appartement à Paris »
Comment commence ton aventure Paris&Co ?
L’aventure Paris&Co commence par les Grands Prix de l’Innovation de la Ville de Paris. Au lancement de Weezevent, nous avions comme politique de participer à tous les concours de startups pour faire grandir notre réseau. Nous avions senti que ce concours était bien structuré et son intitulé parle de lui-même. Nous avons eu la chance d’être finalistes, ce qui nous donnait déjà l’énorme avantage de prendre la parole et de défendre notre projet. J’étais convaincu qu’une fois devant le jury, nous aurions la capacité de montrer notre implication et toute l’énergie que nous déployions pour faire avancer notre entreprise. Cela a fonctionné, car malgré des contraintes techniques qui nous ont empêché de diffuser notre présentation, nous l’avions tellement bien préparée que le jury l’a probablement ressenti. Quand nous avons gagné, en 2010, nous étions en phase de levée de fonds. Et quelques semaines après, nous levions un million d’euros : une belle somme à l’époque ! Les Grands Prix de l’Innovation fonctionnent comme un tampon qui vient valider le modèle de l’entreprise.
« Nous avons levé un million d'euros après avoir remporté les Grands Prix de l'Innovation »
Vous n’avez pas été incubé chez Paris&Co tout de suite ?
Nous avons effectivement intégré Nord Express deux ans après. Nous avions besoin à l’origine d’intégrer des locaux avec une grande flexibilité. Et nous avons pu grandir sereinement dans un incubateur qui apportait cette caution « innovation », entourés d’autres entreprises innovantes. Nous y avons probablement passé les meilleurs moments de l’existence de notre société, ces moments propres à l’aventure entrepreneuriale, assez désorganisés, mais terriblement excitants. De l’extérieur aujourd’hui, on voit la réussite économique de Weezevent, mais le plus nourrissant, le plus fantastique de cette entreprise, c’est l’aventure humaine, tous ces souvenirs que l’on se créé, qu’on vit puissance 1 000 quand on est entrepreneur car on est responsable de tout cela !
« Nous avons passé à Nord Express les meilleurs moments de l’existence de notre société, ces moments propres à l’aventure entrepreneuriale »
Cette croissance était linéaire ou s’est faite par à coups ?
Une startup c’est une ascension dont les différents paliers sont comme les différents camps de base. Quand on est confortablement installé dans le camp de base, c’est là qu’on restructure, que l’on recompte les ressources, le matériel et que l’on prépare l’ascension suivante. Pour une startup, l’ascension se fait sur une crête, on peut tomber du mauvais côté à tout moment ou au contraire suivre la pente dans le bon sens. Et c’est à ce moment là que tout s’enchaîne avec un effet boule de neige.
« Une startup c’est une ascension dont les différents paliers sont comme les différents camps de base »
Des ingrédients pour réussir cette ascension ?
A un moment, tous les efforts faits sur le commercial, le produit, les relations presse payent. Mais cela ne s’explique pas, il n’y a pas de recette magique. C’est l’ensemble de ces facteurs mis bout à bout qui fait que cela fonctionne. Et contrairement à mon papa qui a entrepris seul, les moments de joie et de doute se partagent et permettent de passer la vague plus sereinement. Weezevent c’est vraiment un duo, sans Sébastien je ne l’aurais jamais créé et l’entreprise ne serait pas ce qu’elle est aujourd’hui sans lui. Nous prenons toutes les décisions à deux, d’ailleurs nous partageons le même bureau. La force de ce projet réside dans ce duo. Le jour où il arrête, j’arrête aussi !
Pourquoi avoir rejoint le Conseil d’Administration de Paris&Co ?
Nous sommes restés incubés à Nord Express pendant trois ans, puis je suis devenu jury et président de la catégorie services aux particuliers des Grands Prix de l’Innovation. Quand on passe de l‘autre côté, c’est rafraichissant car une startup peut vite devenir une PME qui est dans la position dans laquelle étaient ses concurrents quelques années avant. Cela permet de se remettre dans cette ambiance et cela me donnait l’opportunité de me faire en quelque sort le porte-parole des startups.
Puis, il y a deux ans, Loïc Dosseur (Directeur Général de Paris&Co) m’a proposé de rejoindre le conseil d’administration car il souhaitait y impliquer davantage les startups. J’ai découvert une autre facette, à l’opposé du monde des startups : un conseil d’administration avec des politiques issus de la Ville de Paris et de la Métropole du Grand Paris, des représentants d’entreprises du CAC40, qui ont des enjeux divers. J’ai trouvé cela passionnant car cela éclaire sur les défis organisationnels qui attendent l’agence pour continuer à bien la faire grandir. Pour être honnête, je ne m’attendais pas à un consensus si extraordinaire : je n’y ai jamais entendu d’opposition bête et méchante pour ou contre tel ou tel projet. Les personnes qui y siègent sont intelligentes et de bonne volonté. Elles ont compris que l’enjeu dépassait la bataille électorale avec l’ambition de créer des emplois et de stimuler l’innovation.
En soi la belle réussite de Paris&Co la protège, l'agence est de moins en moins dépendante de financements publics et donc de pressions potentielles, ce qui lui confère une sorte de totem d’immunité et la sécurise.
« Je ne m’attendais pas à un consensus si extraordinaire au sein du Conseil d’Administration de Paris&Co. Les personnes qui y siègent sont intelligentes et de bonne volonté »
Quels sont tes enjeux en tant que nouveau Président du Conseil d’Administration ?
Mon enjeu est de continuer à maintenir cet état d’esprit génial. C’est également d’accompagner Paris&Co dans ces évolutions et les défis qui l’attendent. Les Jeux Olympiques d’abord, mais aussi continuer à grandir sans perdre cet esprit startup et innovation, ou encore continuer à bien accompagner ses clients…
Du lancement de ta startup chez Paris&Co à la présidence du Conseil d’Administration de Paris&Co, quel regard portes-tu sur ce parcours mixte ?
Nous avons actuellement les mêmes problématiques organisationnelles de croissance chez Weezevent. Weezevent, c’est un Mustang au galop : c’est important que cette croissance et cette rapidité ne se fassent pas au détriment des clients et de la structuration future. On a toujours envie d’aller plus vite mais il faut faire attention de ne pas brûler des étapes qui nous feraient repartir de zéro. L’idée c’est d’accompagner, de maintenir l’état d’esprit tel qu’il est aujourd’hui au sein du conseil d’administration et d’accompagner la direction dans la structuration de ce projet.
Pourquoi est-ce une bonne nouvelle pour Paris&Co d’avoir un Président entrepreneur ?
Ce que je peux apporter dans un conseil d’administration qui a un rôle politique, c’est un côté plus opérationnel, plus terrain et plus proche des startups qui sont malgré tout le cœur du produit. Aujourd’hui Paris&Co a un défi : étant financé par les grands groupes, l’agence ne doit pas oublier que le produit brut ce sont les startups et leur capacité d’innovation. Il faut veiller à rester attractifs et proches des besoins des startups et toujours préserver l’équilibre entre les startups et les grands groupes. Mon enjeu est donc de préparer l’agence aux défis du futur, m’assurer que la dynamique se poursuive en amenant une grille de lecture entrepreneur.
« Mon enjeu est de préparer l’agence aux défis du futur, m’assurer que la dynamique se poursuive en amenant une grille de lecture entrepreneur »
Peut-on assimiler Paris&Co à une startup ou à une PME dans son évolution ?
Dans l’image, Paris&Co a un côté PME, car l’agence est souvent associée à un organisme institutionnel. Dans la réalité, elle est très proche d’une startup, qui tente des choses, prend des risques mais avec une croissance saine, rentable et maîtrisée, ce qui n’enlève pas l’ambition. Ce qui me plaît c’est que Weezevent comme Paris&Co sont deux structures qui ont beaucoup d’ambition sans être dans la démesure.
« Weezevent comme Paris&Co sont deux structures qui ont beaucoup d’ambition sans être dans la démesure »
Trois #hashtags pour évoquer l’équipe Paris&Co ?
#Engagée
#Experte
#Dynamique
Quelques chiffres sur Weezevent et les prochaines étapes ?
Aujourd’hui, nous sommes leaders de la billetterie en France, derrière la FNAC. Tout l’enjeu est de devenir un acteur européen et peut-être un jour mondial. L’ambition sur laquelle on travaille, c’est de développer la boîte à l’international sur l’Europe, avec l’ouverture de bureaux à Londres, Madrid, Lausanne et Montréal. Si nous parvenons à dupliquer cette belle réussite à l’international, Weezevent peut devenir une belle success story française. Mais il y a encore certaines barrières à franchir comme les différences culturelles ou un protectionnisme naturel à l’entrée, qui font que dans tous les pays, priorité est souvent donné aux entreprises locales.
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Crédits photos : Edouard Barra / Weezevent